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Du désert d'Atacama à la maison de Pablo Neruda au Chili

Le 24 octobre 2013, je prenais la direction du Chili. Durant le voyage je fredonnais intérieurement la chanson Chile, poème de Nicolas Guillén mis en chanson par Francisco Montaner :

« Chile: una rosa de hierro, fija y ardiente en el pecho de una mujer de ojos negros. Tu rosa quiero. »

« Chili : une rose de fer fixe et ardente sur la poitrine d'une femme aux yeux noirs. Je veux ta rose »


Pétroglyphe provenant de la culture de l'Aconcagua

Et l'avion atterrit. De Santiago je suis allée à la découverte du désert d'Atacama, ouverture vers le nord, vers l'immensité des terres, vers el Valle de la Luna, région désertique au paysage lunaire, classée sanctuaire naturel.

Je contemplais le plateau pierreux, les cimes enneigées tranchantes sur l'horizon qui soudain se teignit de toutes sortes de couleurs : du jaune paille à l'orangé vif, au mauve tirant vers le violet et au gris dense plus je montais dans le ciel. Et alors que je mangeais, un renard, pas du tout inquiet, s'est approché à quelques mètres, en quête de nourriture.



Ensuite je visitai les lacs salés, réserves nationales de flamands qui sont les seules manifestations mouvantes et visibles de loin dans ces innombrables sinuosités cristallisées.


Puis se furent les lagunes Miscanti et Miñiques qui sont d'une grande pureté ; ces lacs sacrés m'ont impressionnée par leur découpe, leur dépouillement, le calme qui y planait, la paix qui s'imposait, la sérénité qui imprégnait l’atmosphère fraîche, la majestuosité de l'ensemble avec son équilibre naturel. Je restai en arrêt devant les langues fluides de couleur turquoise virant au bleu sombre, puis je cheminai lentement par l'étroit sentier qui les borde ; la pente sombre de la montagne attenante avait quelque chose de métallique. Aussi, imperceptiblement, le temps était devenu autre.

Sur les versants opposés, certains visages apparaissaient, marqués par les roches ou les dénivelés ; ces formes étaient empreintes de douceur, d'une force bienveillante, comme protectrice du site où des offrandes sont déposées. Au dernier plan, une sorte de pyramide neigeuse sortait d'entre les pentes et la lumière ourlait les abrupts ombreux des autres pics de la cordillère.

Tout était silence, lignes pures et inclinait à la méditation.

Un soir sous l'immense ciel étoilé dans cette région près d'Antofagasta où la sécheresse est extrême, j'ai eu l'opportunité d'écouter les explications d'un féru d'astronomie, sur la rotation du ciel, découvrir la Croix du Sud et une Vénus particulièrement étincelante. La nuit australe est d'une netteté telle que j'avais l'impression de plonger dans un infini captivant où je distinguais la Voie lactée, la constellation du Scorpion, le Petit Nuage de Magellan ainsi que le Grand, et je finis ce féerique glissement du firmament par quelques étoiles filantes (comme un clin d’œil) et un satellite (pour signer le tout) en joignant les directions de cette éclatante voûte céleste.

Le lendemain, je continuai le périple pour aller frôler les geysers. Ce qui m'attendait à l'aurore, fut une véritable marmite en ébullition ; le paysage étant grandiose avec ses hautes colonnes d'eau ou ses fumerolles dispersées qui jaillissaient par intermittences.


Et le soleil se leva.

Un passage au village sera l'intermède avant de prendre le vol en direction de Valparaiso.

Dans cette ville portuaire, les fresques sont nombreuses. J'en ai choisi une, faite en hommage à la femme qui façonne la terre et qui fera naître la poterie ; c'est un chant lumineux et riche de symboles représentant la vie.



C'est une transition qu'aurait pu apprécier Pablo Neruda.. Justement, j'arrive à la maison du poète à « Isla Negra ». Je ramasse de petits coquillages violets surmontés d'une brillance perlée et reçois même une curieuse tête faite d'algues, de mollusques confondus ; très étrange.

Mais Pablo Neruda est là ; son portrait imposant est dans la grande salle d'accueil, pensif, absorbé mais très présent.

A partir d'une cabane, il a construit peu à peu son domaine face au Pacifique.

"J’ai construit ma maison comme un jouet et j’y joue du matin au soir. Elle a poussé peu à peu comme les gens, comme les arbres... » Disait l'écrivain..

Ainsi, je me laissai guider dans ce labyrinthe de pièces, de couloirs, entre les alignements de fenêtres et je pris quelques photos ; surtout de ce qui m'attirait. ; ainsi je captai par une baie vitrée ces fascinantes figures de proue qui habitent les salons dans une sorte d'envol.

Et qui rêvent aux lointains abyssaux.

J'ai été émue de voir sa table de travail dans un endroit un peu à l'écart où il écoutait la pluie tomber. Là, par un jeu de la vitre, les herbes tendres poussent magiquement pour les chevaux de céramique qui côtoient une grande main posée sur la table attendant un signe, une feuille ! Même des visages amis y flottent encore.

C'est là qu'il créa El canto general.

Et c'est là aussi que l'homme a choisi sa dernière demeure, face aux vagues, à côté de sa femme, dans les rafales de vent et les embruns.

« Compagnons, enterrez-moi à Isla Negra, face à la mer que je connais, en cet endroit rugueux de pierres et de vagues que mes yeux perdus ne reverront plus.. » Écrivit-il.

Alors, de l'autre côté du continent et par delà l'Atlantique, je suis celle qui regarde au pied de la fenêtre donnant sur le large pour percevoir dans un fondu des éléments : une main de métal, un regard de statue, des mots raturés et entendre un chant aux sons imperceptibles au-delà des vagues et des nuages.

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