A la rencontre des Voyageurs
Ils sont venus de Belgique, de Bulgarie, de Croatie, de Hongrie, de Roumanie, d’Italie, d'Espagne et de Tchèquie pour rencontrer les Voyageurs ou les Roms qui parcourent l'Europe depuis de nombreux siècles et qui sont en vérité, les premiers Européens.
C'est lors de leur première journée dans le Languedoc, que quinze participants venus de ces pays et parlant français, ont pu écouter Jean-Pierre Dacheux qui a ouvert la semaine consacrée à l'atelier thématique Grundtvig « Cultures gitanes, cultures d’Europe » qui se déroulait à Nîmes. Ce spécialiste de la culture rom a défini avec précision les termes employés pour désigner le peuple.
Il m'a confié être particulièrement intéressé par cette intervention car il avait la chance d'avoir devant lui un auditoire constitué de personnes originaires d'une diversité de pays européens et qui représentaient en quelque sorte une symbolique de l'Europe.
Le jour suivant, soit le 24 mai (et jour dédié à Sara pour les Gitans), nous sommes allés aux Saintes-Maries-de-La-Mer et avons vécu un peu son pèlerinage. Nous avons ainsi assisté à la descente des châsses dans l'église comble ; les personnes présentes étaient absorbées, n'ayant qu'un seul regard vers la haute chapelle, se serrant les uns les autres le plus possible et se poussant encore plus pour laisser entrer les porte-bannières et les divers officiants venus de toute la région.
Intérieur de l’église pendant la descente des châsses et bannières
Après la sortie de Sara à la lumière du jour, je suis allée écouter un groupe d'hommes (une quarantaine, assis autour d'une tablée), ils étaient de différentes origines et chacun leur tour, ils chantaient ou jouaient de la guitare.
En revenant sur le parvis, je me suis trouvée isolée dans la partie vide au-delà des barrières, seule, face à Manitas de Plata, toujours présent en ce lieu sacré depuis des années de pèlerinage. Je lui ai envoyé des pensées d’affection puis il fut emmené dans la zone protégée. Je n'ai pas eu le temps de partir, les chevaux camarguais arrivaient déjà et je dus me plaquer contre les barrières pour éviter tout écart des montures retenues avec grande maîtrise par les gardians. J'ai pu toutefois me faufiler entre les pèlerins qui entraient sur l'aire, portant croix de fleurs et bannières.
Sortie de Sara à la lumière du jour
Sara, patronne des Gitans
Gardians
Le même soir nous avons été invités à partager un repas dans un campement ; ce fut l'occasion de voir de très jolies roulottes.
A ces journées très actives, ont suivi le Colloque passionnant au Lycée agricole de Rodhilhan ainsi que les divers ateliers. Je dois dire que les échanges avec les participants venus de points divers de l'Europe m'ont apporté beaucoup au niveau de leur ressenti et de leur connaissance des Roms dans leur pays d'origine. Ce fut aussi un partage dans la bonne humeur et la convivialité ; ce que j'ai beaucoup apprécié.
Une semaine très dense avec aussi la projection du film “Les fils du vent” consacré principalement à la musique et à la famille de Django Reinhardt. On y voit également ce qu’est le voyage et les difficultés rencontrées maintenant pour stationner.
Il y a tant à dire ! Je souligne par ailleurs le magnifique travail de Thérèse Chevalier qui a constitué une fresque historique concernant la migration des Roms au cours des âges et qui a beaucoup intéressé les participants. La démarche de Thérèse est louable car documentée et le mur qu'elle élabore est toujours remis à jour (photos, textes, dates) dès qu’il y a une nouvelle connaissance à apporter. Comme elle est passionnée, on l'écoute toujours avec grand plaisir.
Le lendemain, nous avons eu la chance d'assister à un spectacle de MamZelle FlamenKa, dite La Torito. Ce fut une joie pour moi de la revoir car j'avais appris la sévillane avec elle au Centre culturel andalou de Nîmes, il y a de cela quelques années..
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Avec Payou Baptiste
La Torito
La dernière journée fut consacrée à la visite du Centre Social des Gens du Voyage d' Alès. Nous avons rencontré Dominique Garrel qui a remis à un chacun un exemplaire de son CD « Jogadis, le chant des Peuples autochtones ». Je l’écoute avec plaisir car j'y retrouve des musiques du Rajasthan ainsi que des chants d'autres groupes aux origines diverses, accompagnés par l'accordéon, les grelots, le hautbois, le violon, la guitare, le tabla.... : un beau témoignage musical.
L'accueil de Payou Baptiste, président des gitans du Languedoc-Roussillon, délégué national de l’Union française des associations tsiganes et référent européen dans la représentation de la communauté des gitans, a été très chaleureux. Nous avons mangé tous ensemble et nous nous sommes pliés aux lois des tâches attribuées aux hommes et aux femmes dans la culture gitane tout en tenant des conversations très profondes et fructueuses avec Payou ainsi qu'avec le personnel du centre et de l'école attenante. Page : Clic !
Ce qui m'a particulièrement touchée est le fait que Payou Baptiste accepte avec plaisir la collaboration de non gitans dans la démarche de reconnaissance de leur identité et qu'ainsi, effort après effort, échange après échange, nous soutenant les uns les autres, nous pouvons avancer vers une Europe dans laquelle nous aurons la possibilité d'œuvrer ensemble dans la paix.
Avant de partir, je lui ai offert un exemplaire de mon livre "Les voyageurs au sang d'or" et il m'a montré une vraie joie, me témoignant à plusieurs reprises sa satisfaction du fait qu'une non gitane fasse quelque chose qui les serve.
J'en suis très heureuse et j'espère que d'autres rencontres se feront par la suite, dans l'ouverture et l'accueil mutuel.