top of page

Une perception de la poésie

Définition :

La poésie est un genre littéraire très ancien en vers ou en prose. Le choix des mots est fondamental. Il existe ainsi de nombreuses formes que je ne vais pas énumérer.

On note que le travail de la langue est une constante. Hors la métrique et la rime, il faut signaler l’importance des échos phoniques, la recherche lexicale, les figures de style, la musicalité, les harmonies, les échos et les résonances pour aborder là presque un thème musical.

J’aime beaucoup la citation de Reiner Maria Rilke dans Lettres à un jeune poète :

« Personne ne peut vous apporter conseil ou aide, personne. Il n’est qu’un seul chemin. Entrez en vous-même, cherchez le besoin qui vous fait écrire : examinez s’il pousse ses racines au plus profond de votre cœur. »

Par ailleurs un autre poète que j’aime particulièrement est Federico Garcia Lorca ; il dit :

« La poésie est la rencontre de deux mots que personne n’aurait pu imaginer ensemble. »

Je remarque que dans l’exercice poétique, il y a un jeu et à la fois un mystère et une élévation quand la démarche va jusqu’à la dimension spirituelle et que le poète arrive à un dépassement de lui-même.


C’est ainsi que François Raviez parle de la « Vertu incantatoire des mots ».

J’aime bien cette appellation car les mots se chargent d’un pouvoir qui élève, qui agit sur le poète et le lecteur et de cette façon peut devenir magique.

Il parle aussi de la « présence invisible », d’un dieu ou de ce que l’on pourrait imaginer d’incommensurable.

Les mots ont alors une portée ineffable qui va bien plus loin que des mots évocateurs car on touche à ce moment-là à une dimension de merveilleux ou de sublime.

Philippe Jacott évoque dans cette dimension de l’écriture « La fascination des yeux ouverts, décidés à voir plus loin que le visible. »

Voici son explication : « L’expérience poétique naît d’une forme de contemplation. » « Elle consiste à accueillir et à interroger des événements mi- sensibles, mi- spirituels surgis d’une rencontre avec le monde extérieur mais avec un retentissement particulier dans la vie intérieure. La poésie ne va pas plus loin. Elle constate, elle recueille, elle cherche à dire une énigme et en la disant, elle l’éclaire, mais elle ne l’explique pas. »

De là, nous pouvons arriver à une transfiguration poétique.Je me suis aussi intéressée à André Rolland de Renéville qui a écrit le livre L'expérience poétique ou le feu secret du langage. Pour lui, « l'étude des relations qui existent entre les poètes, épris du mystère de la parole, et les mystiques, désireux de s'abolir dans le pur silence, aura été la préoccupation de toute une vie. Cette étude entamée dès Rimbaud le voyant, se poursuit et se développe dans l'expérience poétique, c’est probablement l'ouvrage critique le plus important de Renéville et qui synthétise le mieux les résultats de l'ensemble de ses recherches. Il y examine avec une rare pénétration les principales questions spirituelles et métaphysiques soulevées par la poésie moderne, de Gérard de Nerval à André Breton, en passant par Novalis, Edgar Poe, Baudelaire et Mallarmé. Il éclaire les rapports de la conscience et de l'inconscient, le fonctionnement de la pensée analogique du poète dans la création des mythes et des symboles. Il montre explicitement comment, depuis le romantisme, la poésie cherche à percer les arcanes de l'univers et à rejoindre, par-delà le monde sensible, une réalité spirituelle et secrète perçue intuitivement. La fonction sacrée du poète dans le monde est ici réaffirmée avec une force peu commune. »


Selon Octavio Paz : « La poésie est l’âme cachée de la vraie vie. On peut la comparer au mysticisme car, hors de son propre contexte et de sa terminologie, elle est inexplicable. La poésie se signifie elle-même à travers le mot. Elle emplit le silence qui nous entoure et, avec le mot juste, s’engage à nous donner tous les mots. Le mot poétique ne peut se remplacer par aucun autre. Il est essentiellement différent de celui de la prose et du langage quotidien. »


Une autre approche est celle de Paul Verlaine ; il nous dit dans ce poème sa vision de l’art poétique :

De la musique avant toute chose, Et pour cela préfère l'Impair Plus vague et plus soluble dans l'air, Sans rien en lui qui pèse ou qui pose. Il faut aussi que tu n'ailles point Choisir tes mots sans quelque méprise : Rien de plus cher que la chanson grise Où l'Indécis au Précis se joint. C'est des beaux yeux derrière des voiles, C'est le grand jour tremblant de midi, C'est, par un ciel d'automne attiédi, Le bleu fouillis des claires étoiles ! Car nous voulons la Nuance encor, Pas la Couleur, rien que la nuance ! Oh ! la nuance seule fiance Le rêve au rêve et la flûte au cor !

De la musique encore et toujours ! Que ton vers soit la chose envolée Qu'on sent qui fuit d'une âme en allée Vers d'autres cieux à d'autres amours. Que ton vers soit la bonne aventure Éparse au vent crispé du matin Qui va fleurant la menthe et le thym... Et tout le reste est littérature.

En parlant maintenant de Baudelaire, Henri Maître évoque des modulations, un « Double effort de l’âme et de l’esprit dans la maîtrise du verbe. »

Sa définition se trouve également dans cette phrase : « Un absolu de spiritualité et perfection du langage qui permet d’atteindre une identité essentielle de l’âme et du verbe qui est bien l’antique et inlassable ambition de la poésie. »

Ou dans cette jolie expression : « Incarnation de l’âme dans l’art »

Ou encore : « Vibration de l’intériorité. Images et symboles, rythmes, sons et ordonnances, sont les lieux de contact et de fusion de ces termes dans l’existence poétique. »

A la suite, voici l’épilogue de Baudelaire au recueil Les fleurs du mal

« O vous, soyez témoins que j’ai fait mon devoir

Comme un parfait chimiste et comme une âme sainte.

Car j’ai de chaque chose extrait la quintessence,

Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or. »

Pour moi, la poésie est comme un miracle de notre athanor, une élaboration très fine d’une exaltation nous faisant grandir et qui de ce fait permettra à autrui de s’élever aussi.

Conférence donnée en octobre 2018 à Lunel dans le cadre du Festival Folquet de la Poésie organisé par l'association "Songes"

À l'affiche
Posts récents
Par tags
Nous suivre
  • Facebook Classic
  • Twitter Classic
  • Google Classic
bottom of page